04.08.2020 - HOMMAGE A BEYROUTH - Salâmun li Bayrût - KHALED TAKRETI.

Du 3 août au 27 octobre 2022 - Galerie Claude Lemand

  • TAKRETI, Beyrouth.

    Beyrouth, 2020. Acrylique sur toile, 150 x 120 cm. Collection privée. © Khaled Takreti. Courtesy Galerie Claude Lemand, Paris.

HOMMAGE A BEYROUTH - Salâmun li Bayrût - KHALED TAKRETI.

« Le beau visage de Beyrouth ne va jamais dis­pa­raî­tre ! »

OLJ / Propos recueillis par Colette KHALAF, le 20 jan­vier 2021.

Vous par­ti­ci­pez à cette expo­si­tion « Hommage à Beyrouth », orga­ni­sée par France et Claude Lemand, et qui com­prend plu­sieurs artis­tes. Votre tra­vail pic­tu­ral témoi­gne d’un lien orga­ni­que avec le Liban et notam­ment avec sa capi­tale, bien que vous soyez consi­déré comme le chef de file de la pein­ture arabe et syrienne contem­po­raine. Comment décri­vez-vous ces rap­ports ?

Je suis né au Liban et le pre­mier deuil dans ma vie s’ins­crit à l’âge de 12 ans, quand j’ai dû quit­ter ma maison à Beyrouth, mon quar­tier et le Liban à cause de la guerre civile de 1975. J’avais le cœur déchiré ce jour-là, mais je savais qu’un jour j’allais retour­ner chez moi à Beyrouth. Mes parents se sont mariés au Liban, ma grand-mère et mon grand-père y sont enter­rés et la maison de mon enfance est tou­jours la même à Beyrouth où ma mère (dont la mère bio­lo­gi­que est liba­naise) réside actuel­le­ment. Elle vit dans cette maison depuis son mariage et j’y ai grandi. J’ai tou­jours fait des allers-retours à Beyrouth, car la moitié de ma vie, avant mon émigration, était divi­sée entre les deux pays, le Liban et la Syrie. Quant à ma mère, elle repré­sente mon lien le plus solide avec le Liban. J’y allais tous les deux mois (avant le confi­ne­ment) et je rési­dais chez elle, dans la même cham­bre où j’ai grandi. Les Frères maris­tes de Beit Méry, les bou­ti­ques de Zahar pour ache­ter des vête­ments, les bou­ti­ques de Donald Duck pour ache­ter les jouets, la pâtis­se­rie Dandy pour les bon­bons et les glaces, autant de sou­ve­nirs d’enfance qui m’ont tou­jours accom­pa­gné en gran­dis­sant. J’aime ce pays.

Cette grande expo­si­tion-vente cari­ta­tive a été lancée par Claude et France Lemand au len­de­main de la catas­tro­phe du 4 août 2020, qui a laissé une grande cica­trice dans votre cœur. Vous avez été invité à en faire partie. Cette déchi­rure se tra­duit-elle dans votre tra­vail par de la noir­ceur ou par de l’espoir ?

Je suis ori­gi­naire de deux pays qui ont eu leurs gran­des bles­su­res et leurs bou­le­ver­se­ments : le Liban et la Syrie. Le 4 août a été un choc de plus dans ma vie. Comme il l’a été pour le reste de la pla­nète. Certes, nous sommes encore en deuil car l’explo­sion a détruit notre ville et notre âme aussi. Les cœurs étaient brisés plus que les vitres de la ville. C’est un grand choc car tout ce qui est maté­riel peut être réparé sans lais­ser des mar­ques, mais pas l’humain. Cette grande catas­tro­phe a laissé des stig­ma­tes en nous. Mais j’ai appris à tou­jours me rele­ver tout comme le Liban qui renaît tou­jours de ses bles­su­res. Il y a donc un espoir qui cir­cule dans l’âme des œuvres de cette expo­si­tion. Une sorte de prière par la pein­ture pour un Liban fort et beau.

Vous pensez que ce beau visage du Liban que vous avez voulu trans­met­tre dis­pa­raî­tra un jour ?

Jamais ! Ce beau visage de la ville de Beyrouth ne va jamais dis­pa­raî­tre. Car la ville est faite par les Libanais, un peuple éduqué, cultivé, qui aime la vie et qui a le don de savoir vivre. Je suis sûr que comme à chaque fois, il est capa­ble de sur­vi­vre et de trou­ver la bonne solu­tion pour se recréer encore une fois. Il ne faut sur­tout pas oublier que le monde entier aime le Liban et le sou­tien­dra. C’est un pays qui a beau­coup de charme et ses admi­ra­teurs sont nom­breux par­tout dans le monde. Je suis fier de dire que je viens du Liban. Certes, il a tra­versé des pério­des dif­fi­ci­les mais malgré tout, il reste l’oxy­gène du Moyen-Orient.

Copyright © Galerie Claude Lemand 2012.

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