Chaouki Choukini
Chaouki CHOUKINI (born in 1946) By Thierry Savatier, August 2021.
Chaouki Choukini est né à Choukine (Sud du Liban) dans une famille modeste, en 1946. Après avoir envisagé des études de médecine en Egypte, il se forma, grâce à une bourse du gouvernement, à l’Ecole supérieure des Beaux-arts de Paris de 1967 à 1972. En 1984, il effectua un voyage au Japon qui le marqua dans son approche plastique, traduites dans le choix de formes sobres et épurées. Il y rencontra l’oncle de sa femme, le sculpteur Fumio Otani ; celui-ci lui apprit les techniques traditionnelles de sa discipline qui lui permirent, à l’aide d’outils spécifiques, d’obtenir des résultats très différents de ceux qui lui étaient familiers jusqu’alors. Il enseigna la sculpture à l’Université libanaise de Tripoli de 1985 à 1987, puis, de 1989 à 1991, à l’Université de Yarmouk (Jordanie). Il vit et travaille en France depuis de nombreuses années.
Au cours de ses études, il découvrit ses matériaux de prédilection : l’argile, mais surtout le bois et la pierre. L’enseignement, très académique à l’époque, aurait dû le conduire à sculpter sur modèle vivant, mais il fut rapidement attiré par l’abstraction.
Les sculptures de Chaouki Choukini témoignent de son esthétique singulière. Abstraites, elles n’en incluent pas moins quelques détails minéraux ou biologiques, voire anthropomorphes ou que l’on peut interpréter comme tels (Liberté fauve I). Ses constructions formelles étranges semblent parfois défier les lois de l’équilibre ; elles présentent des évidements ou des saillies inattendus qui plongent le spectateur dans un imaginaire à la fois onirique et d’autant plus inquiétant que la douceur des surfaces impeccablement polies contraste avec le caractère parfois sombre de l’ensemble (Paysage au clair de lune, 1978 ; Lieu, 1978). Lorsque l’on sait que l’artiste travaille le bois ou la pierre en taille directe, on mesure sa dextérité à jouer des oppositions matière/lumière pour en tirer le meilleur profit. La spiritualité et la métaphysique marquent la plastique de ses œuvres, tout comme l’humanité les imprègnent (Petit prince. Enfant de Gaza, 2010). L’artiste ne s’interdit pas pour autant quelques hommages à l’art de ses prédécesseurs, parfois avec un certain humour surréaliste (Hommage à Breughel, 2001) ou un attrait pour l’allégorie tragique, comme ce très totémique Cheval de Guernica (bois, 2010 ; bronze, 2011) dont Picasso, pas plus que du taureau, ne livra la symbolique secrète, laissant au regardeur sa libre interprétation. Les figures de Chaouki Choukini, qu’elles rappellent des paysages, voire des vues satellites ( Les environs de Damas, 2012) dans leur horizontalité ou qu’elles défient le ciel dans leur verticalité (To Beirut, 2020), frappent par leur esthétique minimaliste, sans doute héritée de son expérience japonaise venue compléter ses sensibilités orientales et occidentales.
Chaouki Choukini a obtenu le Prix de la Jeune sculpture en 1978, le Prix de la Fondation Taylor en 2010. En 2015, l’Académie des Beaux-Arts lui décerna le Prix Pierre Gianadda de la Sculpture pour l’ensemble de son œuvre. Ses travaux ont fait l’objet de multiples expositions, notamment à L’IMA (1991), puis « Le Corps découvert » (2012). Ses œuvres sont conservées dans des collections publiques en France, en Jordanie, au Liban, au Qatar, aux Emirats Arabes Unis. Le Musée de l’Institut du monde arabe détient aujourd’hui la plus grande collection au monde de ses sculptures, grâce à la Donation Claude et France Lemand en 2018.
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Claude Lemand.
Born in 1946 in Choukine, South Lebanon. Studied at the Ecole Superieure des Beaux-Arts, Paris, from 1967 to 1972. He was awarded with the Prix for Young Sculpture in 1978. In 1984, he travelled with his wife to Japan. From 1985 to 1987, he taught sculpture at the Lebanese University of Tripoli and then from 1989 to 1991 at the Jordanian University of Yarmouk. Since then, he lives and works in France. He participated to many exhibitions such as that at the Institut du Monde Arabe in 1991. He won the Taylor Foundation Prize in 2010. He participated with seven sculptures at the important exhibition Le corps decouvert at the Institut du Monde Arabe, from March to August 2012.
Translated from French by Valérie Hess
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Marie-Odile Briot.
Lebanese Sculptor (b. 1946, Choukine). He arrived directly from his native village to study in Paris. Since 1973, he regularly exhibits at the Young Sculpture and in various Salons. Choukini carves wood and stone, particularly wood. He fully masters his technique, by playing with polished and hollow areas as well as with the rhythm of empty and full spaces and by making his carving become a penetration into the material through light. His sculptures appear weightless and seem to be the development of surfaces which only hint to the shapes of objects. Whether lute or card table, piano or weaving loom, these metaphysical machines yet `soberly Baroque’ (Salah Stétié) emerge from the primary light to then come back to it. One can find quotes in his sculpture which contribute to the seduction of post-modern sculpture. If modern sculpture is defined by the paradoxical search for the immaterial then its `madness for light’ makes Choukini one of the sculptors of this century. (Dictionnaire de l’Art moderne et contemporain, Ed. Hazan, Paris, 1992).
Translated from French by Valérie Hess
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Salah Stétié.
This Lebanese artist arrived in France directly from his village in South Lebanon. At the time, he carved strange, imaginary and soberly baroque constructions in wood. The formal evidence, on the borderline with fantasy, imposed itself: these sculptures simultaneously appear as irrational monuments, checkerboards for games of chance, figures that are interlocked and involved with a sort of big metaphysical game. Since then, Choukini has divested himself to the advantage of curves and surface planes. He uses the material as a keyboard and extracts from it powerful and delicate formal compositions on which are displayed a figural suggestion, almost at the second degree. The word ‘keyboard’ is even more so appropriate here as it also translates the sought after and achieved effect, that of music, which is simple and pure similar to a melody, yet sometimes more complex and almost like an orchestra. The mute music present in Choukini’s sculptures is a challenge to the absurd canon that fatally shoots here and there to kill, without succeeding, Lebanon’s soul and body, which stands like a strong and tender mountain, just like the sculptures and sculptor I have here mentioned.
After forty years of career as a sculptor, Chaouki Choukini has always remained true to himself. This man who came from Lebanon, a country of rocks and sun, always pays close attention to the sincerity of objects and shapes, sometimes giving priority to the music of the material, other times to objective representation. This ingenious balance makes each and every one of Choukini’s creations quake with emotion. Choukini’s sculpture reveals the poetic, yet often so tragic, strangeness of our condition.
Translated from French by Valérie Hess
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Public Collections:
National Gallery of Jordan, Amman.
Institut du monde arabe, Paris.
Donation Claude & France Lemand 2018, Museum, Institut du monde arabe, Paris.
FNAC, France.
FDAC, Val de Marne, France.
The city of La Verrière, Yvelines, France.
Mathaf. Arab Museum of Modern Art, Doha, Qatar.