Mahjoub Ben Bella
Claude Lemand. « Né en 1946 à Maghnia, dans l’ouest algérien. Sa formation se fait dans les écoles des Beaux-arts d’Oran, puis à Tourcoing et à Paris. Il s’établit en France. Peintre aux multiples facettes, il réalise des oeuvres monumentales, des céramiques, des objets, à côté de ses grandes et petites peintures sur toile, sur papier, sur bois ou sur pierre. Performances et grandes réalisations monumentales pour les lieux publics. Nombreuses expositions personnelles et collectives dans les musées, centres d’art et galeries d’Europe et du Proche-Orient. A ce jour, Mahjoub Ben Bella est représenté dans vingt musées et collections publiques. Collections privées à travers le monde. » (Claude Lemand)
Marie-Odile Briot. « En 1986, il peint les célèbres pavés du Paris-Roubaix, L’envers du Nord, fresque routière de 12 kilomètres (35 000 mètres carrés). Ce tapis de signes, ce rouleau d’écritures, n’est que l’une des métamorphoses d’un imaginaire calligraphique générateur de son espace pictural. (...) Ben Bella procède à un “dérèglement systématique” de la calligraphie arabe pour en faire l’espace d’une peinture capable d’investir de sa minutie la magie des tablettes et des talismans, et de l’ampleur de sa rythmique le format gigantesque des toiles. La calligraphie développe en contrepoint la répartition des taches colorées et l’économie répétitive de la ligne, comme une chorégraphie désynchronisée dont les écarts ouvrent des vertiges, comme une polyphonie dont les discordances hallucinent. Ce que cette transe doit à la musique, ses amis compositeurs le savent. Ce que cette “véhémence des signes” doit à l’histoire reste au secret de leur illisibilité : dans tels “talismans” cousus, les journaux contemporains de la guerre d’Algérie tiennent lieu de texte sacré. » (Marie-Odile Briot, Dictionnaire d’art moderne et contemporain, Hazan, Paris)
Jean-Louis Pinte. « Ce que l’on distingue d’abord dans sa peinture, c’est bien sûr le signe. Sa répétition. Sa résonance comme s’il s’agissait d’un chant incantatoire. Mais le propos de Mahjoub Ben Bella n’est pas d’illustrer ou de suivre les traces illustratives d’une quelconque calligraphie arabe. Non ! Il en traduit simplement une musicalité qui trouve son rythme aussi bien dans le trait que dans la couleur. La partition s’égrène de part en part, lancinante et vibrante de tous les sons. Bousculant le silence de la monochromie, il couvre la toile jusqu’à l’excès, la frappe du sceau de ses croches, l’embellit de tonalités chantantes. Il la transporte dans une abstraction syncopée et linéaire. Dépassant parfois cette simple tonalité, il tente de nous perdre dans le bruissement même de la vie, dans des paysages frémissants, des stridences retenues. Connu pour ses fresques routières dans le nord de la France, Ben Bella a recouvert de ses signes 12 kilomètres de pavé. Dans ses toiles, il compose des champs sacrés dont les sillons nous entraînent au-delà du simple lyrisme. Il se laisse posséder par le vertige de l’écriture jusqu’à l’extase. Jusqu’à devenir le chantre d’un livre de prières à la gloire même de l’art. »
(Jean-Louis Pinte, Les champs sacrés de Ben Bella, Figaroscope)
Mustapha Laribi. « Longtemps réglées par la graphie arabe, les créations de Mahjoub Ben Bella n’en ont conservé peu à peu que le matériau pictural, donnant à voir une œuvre dense qui s’inscrit dans un double héritage : celui de la calligraphie arabe et de la peinture européenne. Qu’il joue sur la profusion des motifs ou sur les performances de sa gamme chromatique, l’artiste crée un constant et minutieux dialogue du signe et de la couleur. » (Mustapha Laribi, Algérie à l’affiche, 1998)